MINĒRA — RENAÎTRE

MINĒRA — RENAÎTRE

Mon nom est Léa. Je suis la fondatrice de Minēra Ritual et Beauties Lab. En tant qu’entrepreneure, je crois qu’il faut savoir saisir les opportunités et foncer. Mais il faut aussi savoir quand s’arrêter et écouter. 


La popularité du gua sha


Comme certain·e·s le savent, le gua sha est une technique de la médecine traditionnelle chinoise capable de soulager les douleurs musculaires, de rétablir la circulation sanguine et de soutenir le système immunitaire. Elle peut aussi servir à l’embellissement de la peau. 


Le gua sha se pratique au moyen de frictions répétées. Le frottement (le gua) fait ressortir des marques rouges sur la peau, là où le sang stagne (le sha), puis stimule la circulation sanguine et l’action anti-inflammatoire.


Le gua sha a fait son entrée en Occident dans les années 80 avec les vagues d’immigration chinoise. Les thérapeutes de la médecine sportive occidentale l’ont rapidement adopté et ont inventé leur propre technique de grattage: le Graston. Et depuis une petite décennie, le soin facial gua sha est devenu un incontournable dans le monde de la beauté. 


L’histoire de Minēra


Minēra est née pendant la première vague de la pandémie. Le monde entier s’est écroulé, mais ma boutique en ligne Beauties Lab continuait de rouler. J’avais encore accès à la plupart de mes produits, sauf au gua sha, que je commandais directement en Chine*. Comme c'était l'un de mes plus gros vendeurs, je me suis mise à chercher d’autres fournisseurs. Sans succès. Je ne voulais pas cesser d’offrir cet objet tant apprécié de ma communauté. Après tout, c’était LE moment idéal pour pratiquer l’automassage et le self-care


Dans la foulée du mouvement vers les produits locaux, j’ai pris le taureau par les cornes et contacté des artisan·e·s québécois·es pour tâter le terrain. Serait-il possible de recréer cet objet localement? La réponse fut oui, grâce à un atelier de porcelaine dure en banlieue de Montréal. Le seul en son genre au Canada. Le prix et les délais de production étaient raisonnables. Et voilà que je fondais Minēra quelques mois plus tard. 


Pourquoi je pensais que c’était correct


Je suis sensible aux gens qui m’entourent, aux enjeux sociaux, aux questions environnementales. J’avais l’impression, avec Minēra, de faire preuve de cette sensibilité en expliquant ma démarche de manière transparente, pour éviter tout semblant d’appropriation culturelle. Je voyais même la création d’un premier gua sha local comme une célébration de la culture chinoise en sol québécois. J’avais pris soin d’aller chercher l’aval d’allié·e·s dans la communauté chinoise montréalaise, dont des acupuncteur·rice·s. J’avais inclus des corps, des variations de genre, des identités diverses dans les visuels de la campagne de lancement. Ma démarche venait du cœur. Je ne pouvais pas me tromper. La réception fut positive. Minēra a reçu des accolades dans les magazines, sur les réseaux sociaux et à la télévision. Aucun backlash. Jusque-là tout allait bien, je n’avais blessé personne… 


Comment j’ai su que ce ne l’était pas


Puis, il y a eu le mouvement Stop Asian Hate. Avec mon équipe, on a eu des discussions à cœur ouvert. On a passé le micro à ceux et celles à qui il revenait. On a écouté. On a beaucoup appris sur la réalité des communautés asiatiques en Amérique du Nord. On s’est nourri de points de vue différents et rafraîchissants. Puis, on a entendu le témoignage de deux acupunctrices chinoises vivant aux États-Unis, qui nous a secoué·e·s. Elles dénonçaient le fait que de nombreuses personnes s’approprient le gua sha — cet objet puissant de la médecine traditionnelle chinoise — avec beaucoup trop d’insouciance.  


Un tourbillon dans ma tête, mon cœur et mon équipe


Ce jour-là, on a réalisé que du haut de toutes nos recherches, on ne pouvait pas «incarner» la pratique du gua sha. On devait systématiquement reconnaître son origine et son identité culturelle chinoise. On devait aussi créer de l’espace dans notre équipe, sur nos plateformes, dans notre mission pour des acupuncteur·rice·s chinois·es. Il fallait mettre la lumière sur les autres. Non seulement ça, mais il fallait faire profiter la communauté chinoise locale de notre projet. Le malaise était trop grand. Le lendemain on stoppait tout. Pour se remettre en question. Pour ne pas devenir comme tous ces Occidentaux·ales qui s’approprient d’autres cultures en toute impunité pour en faire du cash


Ce qu’on a posé comme actions pour renaître de ça


Après maintes discussions avec mon acupunctrice, Audrey Chen Lafitte, qui prenait déjà part à la campagne, elle et moi avons décidé qu’elle deviendrait l’ambassadrice officielle de la marque. Audrey utilise les gua sha Minēra au quotidien dans sa pratique d’acupunctrice, il était tout naturel qu’elle porte son message. Elle incarne les valeurs et la vision de la beauté naturelle que Minēra souhaite promouvoir en plus de nous transmettre tout son bagage de connaissances et de précieux conseils. 


Depuis le jour 1, Minēra était à la recherche d’une cause à laquelle redonner financièrement. Parce qu’à nos yeux, notre épanouissement personnel n’est pas possible sans celui de nos communautés. Le self-care passe aussi par le collective-care. Nous avons donc décidé de nous associer au Service de la famille chinoise du Grand Montréal. Cet organisme vise le bien-être des communautés chinoises et asiatiques du Québec en accompagnant les nouveaux et nouvelles arrivant·e·s, en défendant leurs droits et en s’assurant de leur épanouissement. Il reçoit dorénavant 2% de tous nos profits. 


Finalement, après des mois de recherches, l’équipe de spécialistes de la peau du Beauties Lab, notre ambassadrice Audrey et moi-même avons suivi une nouvelle formation plus complète et plus approfondie sur la pratique traditionnelle du gua sha. Pour mieux la comprendre, la communiquer et l’honorer. 


Voilà, c’est dit. On a décidé de faire renaître Minēra. D’aligner notre compagnie avec les visées de justice sociale qui nous habitent. Qui vous habitent. On ne le fait peut-être pas à la perfection, mais on vous promet d’avancer avec humilité et d’écouter. 


Merci, 

Léa 


 

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